Mettre l’IA sous F.O.R.C.E.

Si je structure mes prompts et mes mini-projets d’IA avec F.O.R.C.E., j’obtiens des agents plus fiables, moins bavards et surtout reproductibles. En clair : moins de magie noire, plus d’ingénierie. Les faits sont têtus ; les agents, moins, quand on leur parle clairement.
Expérience
But du jour : transformer un brief flou (“fais-moi un compte rendu de réunion propre”) en un agent qui sort toujours le même format utile, sans inventer la moitié du comité de pilotage.
Matériel : un LLM standard comme ChatGPT, un transcript brut (avec hésitations, apartés, et un “on se calle une autre réunion ?” final, évidemment).
Procédure : je compare un prompt “à l’instinct” vs. un prompt encapsulé en F.O.R.C.E.
Version "à l'instinct"
“Résume cette réunion et donne les actions à faire.”
Résultat attendu : variable comme la météo.
Version F.O.R.C.E.
F – Finalité : Tu es un assistant de synthèse de réunion. Mission : produire un brief opérationnel pour des managers pressés.
O – Orientation : Ton sobre, factuel, zéro storytelling. Tu priorises la clarté à l’exhaustivité.
R – Restrictions :
- Pas d’invention de décisions non prononcées.
- Si une donnée est ambiguë, signale l’ambiguïté au lieu de combler.
- Pas de jargon interne sans définition.
C – Connaissances :
- Source unique : le transcript fourni.
- Interdit : connaissances externes, “bonnes pratiques” génériques, suppositions.
E – Expression (format strict) :
- 3 phrases max
- Décisions prises (liste)
- Actions / responsables / échéances
- Risques & points ouverts
- Questions à clarifier (si nécessaire)
Je lance les deux, même données, même modèle.
Résultats
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Naïf : mélange de résumé littéraire et d’enthousiasme inopportun (“une super synergie s’installe…”). Les actions sont là, parfois. Les échéances, rarement.
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F.O.R.C.E. : sortie stable, découpée en sections, actions attribuées, et un utile “Points ouverts” que personne ne pense à lister mais que tout le monde finit par demander.
Bénéfice immédiat constaté : moins d’aller-retours de cadrage, zéro hallucination sur les décisions, et un format que je peux recoller tel quel dans un CRM ou un espace projet. Rien d’exotique : juste précis.
F.O.R.C.E.
F – Finalité
- Une phrase, pas un paragraphe. “Mission : X pour Y afin d’atteindre Z.”
- Dès que je dépasse 2 lignes, l’agent dilue l’objectif. Les oracles aiment les prophéties concises.
O – Orientation
- Trois à cinq balises suffisent : sobre, factuel, priorise l’action, évite le marketing, signale l’incertitude.
- Je gagne en cohérence de ton sur plusieurs runs (utile quand plusieurs personnes exploitent le même agent).
R – Restrictions
- C’est ici que je coupe le courant aux hallucinations : “Pas d’invention. Si doute → le dire.”
- Bonus : ajouter 1–2 “ne fais pas” spécifiques au contexte (ex. “ne calcule pas de ROI sans chiffres fournis”).
C – Connaissances
- Le gardien de porte. “Uniquement ce document-ci. Interdit : web, mémoire externe, suppositions.”
- Quand je l’omet, l’agent part en promenade. Charmant, mais inutilisable.
E – Expression
- La rampe de sortie. Je spécifie un format machine-friendly quand c’est utile (table Markdown, JSON valide, titres H2).
- Le simple fait d’annoncer la structure diminue les digressions et facilite l’intégration en aval.
Effet secondaire intéressant : avec F.O.R.C.E., les prompts deviennent des petits contrats. L’agent sait quoi produire, comment, avec quoi, et ce qu’il ne doit pas faire. Ça ressemble à un cahier des charges minimal, pas à une prière.
Avantages
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Pour des prompts ponctuels : F.O.R.C.E. évite le “prompt spaghetti”. Je peux faire évoluer chaque lettre indépendamment (changer le format sans toucher aux règles, etc.).
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Pour des mini-projets IA : je colle ce bloc en tête de chaque agent. Ça devient la source de vérité. On arrête de débattre de “ce que l’agent devait faire” à chaque bug.
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Pour l’équipe : la transmission est triviale : “voici la mission, le ton, les limites, les sources, la sortie attendue.” On aligne humains et agents en une page.
Annexe — F.O.R.C.E. prêt à copier-coller
Utilisez ce gabarit brut. Remplissez, testez, itérer une lettre à la fois.
F – Finalité :
[Mission en 1 phrase : pour qui, pour quoi, résultat attendu]
O – Orientation :
[Ton, style, priorités : 3–5 balises]
R – Restrictions :
[Interdits, règles de prudence, gestion de l’ambiguïté]
C – Connaissances :
[Sources autorisées ; sources interdites ; que faire si info manquante]
E – Expression :
[Structure et format exacts : titres, listes, tableaux, JSON, longueur max]
Pièges évités (rappel pour moi-même)
- “Finalité” floue → l’agent compense par de la prose.
- “Connaissances” non bornées → hallucinations polies mais fermes.
- “Expression” absente → joli texte, inutilisable en process.
- Trop de verbiage dans “Orientation” → l’agent redevient poète. Personne n’a demandé ça.
Ce que j’en retiens aujourd’hui
F.O.R.C.E. n’est pas un sortilège, c’est un squelette. Il rend visible ce que beaucoup supposent implicite : l’objectif, le ton, les garde-fous, le périmètre d’info et la sortie. En l’écrivant, je construis l’agent — et j’économise les post-rationalisations.
Si vous lisez ces lignes, voici l’action simple : prenez un de vos prompts vivants, re-écrivez-le avec F.O.R.C.E., et ne modifiez qu’une seule lettre à la fois lors des itérations. Observez ce qui bouge. Notez. Stabilisez.
“Nomme d’abord ton but, et les routes se dessineront.” (Gandalf n’a jamais dit ça. Mais il aurait pu.)
Si ce genre de démarche vous intrigue, parlons-en autour de vos propres process.